Photographies de Jean Rolland éditées et tirées par Richard Dumas

Aujourd’hui encore, je me rends compte que je ne sais rien de toi. Ou si peu. Jean. Mon grand cousin. Mon rock’n’roll hero, le Rolling Stone de la forêt de Paimpont. J’ai quelques images en mémoire, des anecdotes glanées ici et là. Mais à part ça ? Des attitudes, une allure. Cette grande mèche blonde que tu portais comme un panache, une marque de défi permanent. Cette silhouette dégingandée, trimbalant sa nonchalance survitaminée à grandes enjambées dans les rues du village. Ces longs bras, ce dos penché sous le capot d’une auto, cette moue généreuse et cette ironie toujours au coin des yeux. Mais à part ça ? Ah oui ! Il me semble entendre encore le son de ta voix, légèrement nasale, écho lointain au timbre rocailleux, bien que la cigarette te laissât indifférent. Une voix puissante aussi, et joueuse toujours, toujours prête à décocher un bon mot. Jean. Mon grand cousin. Un mètre quatre-vingt-sept sous la toise. Fauché à trente-trois ans. La fleur de l’âge.

Pierre-Henri Allain, journaliste et auteur de différents ouvrages sur la Bretagne, vit à Rennes où il est correspondant permanent du journal Libération.

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